News Sud - Sept. 2022

News écrites le 17 août 2022

Danielle Meunier

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Bénévole au Pérou en appui aux peuples originaires Quechuas de Ollantaytambo. 


Ici, en août, c’est le mois des grands vents. La pluie viendra en octobre. Déjà les 950 familles de la Cuenca plantent les maïs, patates, etc… C’est le mois de la pachamama, des intentions et prières pour demander d’excellentes récoltes en 2023, un peu comme la vierge noire du 15 août et la fête de Marie. Il y a 100 ans, le 15 août était sûrement la fête des récoltes, le remerciement des énergies de la nature et non les festivités telles que nous les connaissons à Liège.


La menace principale pour 6000 héritiers directs du monde inka : la concession AURORA 2 

Le monde annonce faim, bouleversement climatique et dans les villages des communautés d’Ollantaytambo, où se conserve l’agriculture organique, on y résistera mieux ! 

La menace principale pour 6000 personnes et leurs troupeaux d' alpagas est une concession minière de 400 Ha au doux nom de AURORA2.

Suite à la manifestation « VIDA SI, MINA NO que la Ronda campesina avait organisée en septembre 2018 et à laquelle avaient participé 4000 personnes, Luis Alberto Elorrieta, le titulaire de la concession, avait baissé les bras. Mais ce 8 juillet, il a payé 1300$ de droits pour y ouvrir une mine prochainement. 

Le territoire est considéré « aire libre » entre Qelqanqa et Yanamayo. Dans le cadre du projet « Mina no, vida si », financé par l’ONG étasunienne « GLOBAL GREEGRANTS FUND », nous avons organisé en janvier un voyage de 40 personnes dans la zone minière d’Espinar, pour y constater les problèmes environnementaux qu’occasionnent les pollutions métalliques : morts d’animaux, mercure et plomb dans le sang des habitants. Ensuite, le 23 juillet, nous avons eu notre première réunion entre quatre communautés et les deux géographes de l’ONG cooperacción pour une formation à propos de la géoréférenciation. 

Le 16 août 2022, huit communautés étaient présentes à cette rencontre « historique ». Nous y avions invité le Gouvernement Régional, le Ministère de la Culture et des archéologues du site de Ollantaytambo. Quatre autorités sont venues pour dialoguer avec les communautés, en tout 22 personnes. La rencontre fut historique car, pour la première fois en 528 ans, le gouvernement écoute les cas de ces communautés complètement abandonnées et discriminées. En septembre commencera le travail de géoréférenciation sur le terrain, c'est-à-dire la correction des limites territoriales pour refaire de bonnes cartes satellitaires correspondant à la réalité des deux communautés menacées directement par la concession, et ce, avant les pluies. A la réunion, chaque communauté a pu expliquer ses nombreux problèmes de limites et de reconnaissance comme communautés originaires. Peu à peu et avec un nouveau projet à rentrer en septembre à l’ONG GGF, on espère que tout s’améliorera. 


Bientôt un beau et bon projet commence en septembre 

L’association de jeunes indigènes inkas vivants est heureuse d’avoir obtenu, de la part de la Ville de Liège, un subside pour développer son projet tant désiré depuis 2013. La recherche de fonds est parfois un peu lente mais il faut persévérer ! 

Le projet s’intitule « INKA MODA » et a plusieurs buts : 

Il formera 36 mères de familles inkas à la couture basique avec une machine à coudre. Cette formation permettra de diversifier les modèles de tissages traditionnels, sans changer bien sûr les icônes textiles. Le professeur de couture s’appelle Elvis, il vit dans la communauté de Huilloc Alto. Il a étudié le stylisme de mode à Lima et Yukay-Urubamba.  

Le projet permettra de financer également le travail d’Elizabeth Llanos, grâce à qui le local sera ouvert chaque jour de septembre 2022 à mars 2023.  

Des sacs réutilisables, avec le logo de Jeunes indigènes inkas vivants, seront réalisés lors de l’apprentissage. Il s’agit à la fois d’une étape dans la formation et d’un moyen de faire connaître la communauté. 

Nous ferons un catalogue des vêtements de mode créés et customisés par les participantes à l’atelier. 

Nous préparerons plusieurs défilés de mode en 2023, pour faire connaître les tissages et le travail de stylisme. 

Merci encore à la Ville de Liège de nous avoir octroyé ce subside, supérieur à ce que nous avions demandé ; c’est un projet important pour les Inkas vivientes. 

Pour ce projet, nous faisons appel à des volontaires parlant espagnol et désirant participer en 2022 et 2023 à la mise en place d’un atelier de confection inka.

Si vous êtes intéressé.e, contactez-moi !  Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. - 00 51 991671700. 

Mon expérience personnelle dans la région de Cusco en 2022 

Cela fait déjà 7 ans que je fais ma vie au Pérou. Mon travail bénévole comme assesseur de 13 communautés me remplit de satisfaction, d’enthousiasme et d’émotions positives. Je dialogue avec de nombreuses personnes positives, nous allons dans le même sens, vers la même conception du développement, pour appuyer des projets importants. 

Ma seconde occupation est de construire peu à peu depuis 2 ans une serre bio à légumes et fruits, source de nourriture, dans la communauté de Huayllarccocha, surplombant Cusco. L’idée a surgi grâce à ma formation sur youtube, qui annonçait déjà il y a 2 ans les crises multiples pour le monde vécues maintenant, manque de finances et de nourriture, pensions insuffisantes. Pour veiller au grain et peut être accueillir les éventuels nombreux migrants dont on parle peu à peu, je me suis lancée avec passion. Physalis, fraises, prunes, salades, pois, carottes, radis, bettes, choux et nombreuses fleurs se développent et m’émerveillent. 

Le fertilisant que j’ai adopté est le Bocachi liquide/solide (fermentation en juillet 2020 de sucre, levure, charbon de bois, pailles, caca de moutons, plus de l’equisetum et de la bouillie bordelaise). Je suis en train de terminer le tas. Je referai un autre tas en septembre. J’utilise aussi du purin d’ortie et d’herbes variées fermentées. 

La mini lagune creusée dans le roc est vivante et abrite des plantes aquatiques et des grenouilles achetées au marché de Cusco. En réalité, dans ces contrées il n’y a plus de grenouilles à cause des doses de fertilisants chimiques et des insecticides, utilisés par les paysans sans information sur leurs effets sur l’écologie. La promotion en était faite par des lobbys sud-américains, mais aussi dans le cadre de projets de développement soutenus par l’union européenne. 

Les grenouilles commencent à chanter à la tombée du soleil. Je les ai invitées pour qu’elles remplissent leur office d’insectivores et insecticides naturels contre les mouches blanches et pucerons et ça marche ! Je collabore avec les grenouilles en aspergeant certaines plantes avec du savon potassique noir et des piments. Ma pièce à vivre fait 4m sur 4m et sert de chambre en mezzanine, de cuisine et de bureau de travail. Elle donne directement dans la serre qui chauffe l’ambiance toujours un peu frisquette à 3700m d’altitude. L’autre pièce contiguë est presque prête pour accueillir des personnes de passage. L’endroit est également un lieu sacré de méditation et de transformation pour alléger le poids des blessures de la planète et de l’humanité. La philosophie de simplicité volontaire me plait et est logique, en vivant auprès de personnes en extrême pauvreté qui vivent avec 50 euros mensuels pour une grande famille.


Une politique hallucinante à Lima 

Les coups bas, la discrimination, les mensonges dans les médias contre le nouveau gouvernement de Pedro Castillo sont quotidiens. Le Président, menacé, marche avec un gilet pare-balle, les mafias de « La résistance » organisée par Keiko Fujimori, ex-candidate d’extrême droite mafieuse, font des blessés à Lima. Mme Fujimori n’accepte pas sa troisième déroute ni un Président issu de communauté. La sécurité à Lima n’existe plus, on revoit les assassinats et persécutions comme lors de la période sombre. Les enjeux pour les mafias et les monopoles, avec la montée au pouvoir du nouveau Président élu par le peuple, sont énormes, car cela pourrait remettre en question leur mainmise sur l’économie et les structures politiques du Pérou. C’est pour cette raison que l’extrême droite néo nazie est aux abois, mais elle cessera sa guerre par manque d’arguments. Cependant, le clan Fujimori et Montesinos, depuis les prisons dorées et bien équipées, continue à avoir une grande influence sur le pays, entre autres par le biais du ministre de l’économie. La campagne de propagande néo-nazie dure depuis un an et s’accentue dans le but de faire chuter la démocratie. Le pays est-il voué au « continuisme » (1), à la domination de l’appareil économique et à la propagande malsaine ? Pauvre Pérou. L’amélioration viendra, encore un peu de patience. Les mots sont durs mais c’est la réalité. 

Une nouvelle fait trembler l’extrême droite obstructionniste qui empêche le gouvernement de travailler et poursuit la persécution politique contre le Président, sa famille. Un prisonnier, ANTAURO HUMALA TASSO injustement emprisonné depuis 17 ans pour rébellion lors de l’Andahuaylazo en 2005, sort ce samedi 20 août de la prison où il a étudié, écrit plusieurs livres. En son temps, Antauro a parlé de lutter drastiquement contre la corruption. Espérons que ses décisions soient positives pour le pays et pour le peuple. Espérons aussi qu' il appuiera les peuples originaires.

Je crois personnellement que cette extrême violence politique répudiée par 80% du peuple, centralisée à Lima et organisée par seulement 2% de la population raciste, violente, golpiste, lobbyiste, qui ne cherche que l’argent et ses propres intérêts, ne parviendra pas à survivre dans le contexte d’une Amérique du sud en marche pour « la grande patrie » (2).

Mais au Pérou, ça ne sera pas facile. L’extrême droite au pouvoir à travers le congrès a par exemple interdit au Président de voyager en Colombie pour célébrer la montée au pouvoir de Petro, nouveau Président élu proposant une nouvelle politique. Le fait fût dénoncé et critiqué par beaucoup de pays. Pedro Castillo a reçu beaucoup de marques d’appuis internationaux.

Les deux gouvernements d’Amérique du sud qui jouent l’absurde à fond, dans la lignée des USA, sont l’Equateur et le Pérou. A suivre…


(1) Le continuisme est un système politique destiné à maintenir au pouvoir une famille, un clan, un système, indépendamment de son orientation idéologique déclarée.

 (2) équivalente à l’union européenne, avec tous ces pays qui s’alignent vers les changements : Colombie, Bolivie, Vénézuela, bientôt Brésil, Argentine, Chili, avec en tête le Mexique. 

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